Sylviane Degunst, mannequin senior

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De professeure de français à mannequin senior, Sylviane a sauté le pas suite à un casting sauvage dans une rue de Londres où elle réside. Devenir mannequin à l’heure où habituellement on s’habille plutôt pour paraître invisible est un rêve qu’elle vit à 100 à l’heure, cheveux blancs portés fièrement.

Once upon a time

Il était une fois, une femme d’un âge certain qui se promène dans Londres, poursuivie par deux jeunes hommes, appareils photo en bandoulière, qui l’accostent pour lui dire qu’ils admirent ses jambes et ses cheveux. Une mésaventure qu’elle a déjà vécue à Paris à 29 ans avec une agence de mannequins qui trouve son physique intéressant mais lui enjoint de faire teindre ses cheveux blancs qui l’accompagnent depuis l’adolescence. Se réclamant de l’agence Ugly Models (littéralement « Affreux mannequins »), la proposition est faite, les téléphones échangés, et la voilà convoquée pour un shooting et un virage dans sa vie à angle droit !

Un relooking conséquent

Lunettes retirées, lentilles en place, cours d’anglais pour perfectionner son sabir britannique, masque d’argile pour effacer les boutons, on lui préfère souvent des femmes plus âgées. Ce qui la fait se sentir plus jeune, mais terriblement déçue. Les castings n’aboutissent pas toujours au ticket gagnant, mais ils lui laissent le temps de découvrir Londres. « Je ne suis pas Kate Moss (bien que nous ayons la même taille) ni Twiggy (bien que nous ayons le même poids) […] Je n’ai pas vingt-trois ans sur un mètre quatre-vingts, ni les dents au garde-à-vous certes, mais je fais confiance au grain de folie british. » Jusqu’à ce qu’elle soit Diorisée, habillée de Dior du haut en bas, tenant en laisse un caniche royal et se promenant dans les rayons beauté du grand magasin Selfridges. Un rêve d’enfant qui se concrétise !

Une silver fox lady

La mode, la mode ! De la table de make-up aux essayages interminables, elle a l’impression d’être payée pour s’amuser. Chaque shooting est différent, on reproduit ses mains pour le Musée de Madame Tussauds, elle pose sous la pluie au pays de Galles pour Getty Images et décide de changer d’agence suite à une annonce recherchant des models de plus de 50 ans. Persuadée de ne vouloir naviguer que dans les hautes sphères de la mode, elle sait qu’il faut se donner pour être l’élue d’un casting. Tourner en Afrique du Sud pour les bijoux Pandora, poser nue pour le Daily Mail, ce qu’elle aime dans sa nouvelle vie c’est le mouvement. Arrive le Brexit et le retour à Paris, « après avoir vécu trop de vies pendant ces sept années anglaises ».

Son image a roulé sur les bus à plateforme rouge, s’est affichée dans le métro londonien pour Habitat, mais maintenant la nostalgie l’habite. « Adieu mon ancien job, à Paris, on néglige les femmes de mon âge, on a peur de leurs rides, de leur chair fatiguée ». En attendant, Londres la rappelle régulièrement mais elle espère encore… « Paris, c’est quand tu veux ! »

Vicky Sommet

« Moi, vieille et jolie » de Sylviane Degunst (éditions Cherche-Midi, octobre 2020)

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