Se disputer est normal. Ce qui agace ou énerve peut donner naissance à un conflit familial, amical ou professionnel. Les causes sont multiples, les raisons pas toujours raisonnables et les injures vite regrettées. Pour le philosophe Maxime Rovere, ces échanges « rendent perceptibles la parenté entre le dialogue et l’escrime ».
À deux ou à plusieurs
C’est presqu’une posture qu’adoptent certains pour tout contester, une manière d’être pour ceux qui veulent affirmer leur pouvoir et une machine à invectiver pour ceux qui, sous couvert d’anonymat, déversent leur fiel pour tout et rien. Comme si le mode de relation entre les êtres humains devait passer par l’agression verbale pour que le contact s’établisse. Est-ce le reflet de la violence de notre société, le besoin de s’affirmer devant plus fort que soi ou le fait qu’aujourd’hui, ce n’est plus seulement le père qui frappe du poing sur la table, mais tout membre de la famille qui prend la parole, tout patron face à ses subordonnés ou toute personne qui veut se donner de l’importance sur un réseau social où, sous couvert d’un pseudo, on peut tout dire, juste pour occuper l’espace ?
La joute verbale
Les échanges où les cris alternent avec les silences, les querelles naissent souvent sans qu’on en connaisse vraiment la cause, peut-être un héritage de notre esprit batailleur bien français, la bataille aux cartes en est un exemple probant. Cela commence dans la cour de l’école, puis lors des rixes étudiantes, pour continuer au bureau, sur les terrains de sport ou dans les conversations entre gens bien nés ! Une petite dispute n’a jamais fait de mal à personne, faut-il savoir réfréner ses ardeurs pour que les mots ne dépassent pas la pensée car les retours en arrière ou les excuses sont toujours difficiles à prononcer. Une dispute peut s’envenimer et générer une autre dispute et le responsable au bout d’un moment n’est plus à montrer du doigt car chacun des participants l’est à son tour.
Victime ou attaquant
Se poser en victime met très vite hors-jeu, donc, au lieu d’adopter une attitude passive, il faut repérer le point faible de l’opposant et évacuer l’idée qu’il faut un coupable et un juge. Pour essayer de se mettre au diapason de son adversaire, le comportement le plus intelligent n’est-il pas d’essayer de réunir plutôt que de diviser pour finalement sortir la tête haute mais ensemble ?! Pour éviter des souffrances inutiles, dues au manque de respect de l’autre, des mots qui touchent ou des jugements négatifs. Si les autres, surtout nos proches, sont notre miroir, on se dispute plus facilement avec ceux qui nous connaissent bien car c’est plus satisfaisant quand on gagne la partie. Enfin, plus la crise est forte, plus c’est l’occasion de remettre à plat notre relation. Les procès d’intention n’enrichissent personne alors que les crises peuvent nous obliger à faire des choix et éloigner les personnes néfastes.
Pour le philosophe, « Il ne faut donc pas trop craindre les disputes, car les émotions qu’elles brassent sont finalement les turbulences du vivant ».
Vicky Sommet
« Se vouloir du bien et se faire du mal. Philosophie de la dispute » de Maxime Rovere aux éditions Flammarion (octobre 2022).
