Insaisissable Kate        

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Difficile de saisir la personnalité de Kate Barry. Fille aînée de l’actrice et chanteuse Jane Birkin, la question s’est posée, comment exister et se construire un avenir entre des parents célèbres et des demi-sœurs qui le deviendront à leur tour ? N’ayant pas trouvé de réponse, elle a préféré s’en aller.

Les débuts de Kate

Formée au stylisme, elle se tourne vers la photographie à 28 ans. Kate initie ses recherches dans cette nouvelle forme d’écriture avec sa mère et ses sœurs pour modèles. Déjà, ses photos recèlent cette mélancolie qui la caractérisait, des atmosphères pesantes, des clichés en noir et blanc, des paysages sans âme qui vive et les femmes qu’elle connaît le mieux, celles qui l’entourent au quotidien comme si le monde au dehors lui faisait peur. Plus tard, une fois reconnue pour son talent, les premières commandes arrivent en provenance des magazines de mode : Vogue, Cosmopolitan, Gala ou l’Officiel n’auront de cesse de faire appel à elle pour son regard si particulier.

Le regard de Kate

Ses photos surprennent et on la trouve parfois là où on ne l’attend pas. Sollicitée pour le 40ème anniversaire du marché de Rungis, elle livrera une série de portraits inattendus en couleur d’hommes en bottes de caoutchouc et en tablier de poissonnier. Elle s’essaiera ensuite au paysage comme une sorte de flânerie avec un appareil en bandoulière. Que ce soit en Israël, en Jordanie ou en Normandie, elle a rendu compte d’un regard délicat et fragile pour des images nommées « Lieux indécis ». Elle disait pour commenter son métier « J’ai pu créer mon espace, un espace à moi » et a toujours voulu s’effacer derrière ses photos, elle qui avait cédé à un moment de sa vie au mirage des drogues qui vous élèvent au-dessus de vous-même. Je l’ai rencontrée une fois descendue de ces paradis artificiels, encore faible mais déterminée à s’en sortir, désireuse de venir en aide à ceux qui avaient plongé comme elle, mais la mélancolie ne l’avait toujours pas quittée et la tristesse affleurait encore sur son visage.

©Kate Barry - Exposition 2023-2024

Kate, la discrète

Elle a décidé de quitter ce monde, mais cette histoire de sororité familiale reste vivante grâce à ses photos : Charlotte Gainsbourg fumant une cigarette dans son lit, blottie sous sa couette avec juste le visage ébouriffé qui apparait, Lou Doillon portant dans ses bras une oie, apprêtée et maquillée comme si elle allait à un rendez-vous mondain, chapeau y compris, ou son autoportrait où on voit à peine son visage de profil, la tête cachée dans un jean qu’elle porte sur la tête avec son bras enfilé dans l’une des jambes du pantalon. La famille de Kate a souhaité montrer son travail dans des expositions qui vont tourner dans le monde entier et c’est le Musée Nicéphore Niepce qui a reçu en dépôt tous les négatifs et ses tirages.

Elle nous permet de découvrir cette femme rare et méconnue qu’était Kate, une femme qui allait toujours à l’essentiel de l’être humain. « Montrer pour ne pas être vue »…

Vicky Sommet

♥ VOIR Exposition « Kate Barry.  My own space » au Quai de la photo à Paris dans le 13ème arrondissement, jusqu’au 20 mars 2024.
♥ LIRE « Kate Barry. My own space », livre de photos et monographie aux éditions de la Martinière.

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