Sylvie Lancrenon, photographe des stars

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Aucune star ne lui résiste, d’Isabelle Huppert à Emmanuelle Béart, de Laetitia Casta à Isabelle Adjani, elle sait mettre à nu ses modèles, avec douceur et intensité. « La photo m’a sauvée » dit-elle après qu’un méchant cancer lui a retiré une jambe et qu’elle a continué à rester debout.

Une jeunesse amputée

Après l’école, il y a eu le pensionnat avec, toujours dans sa valise, son appareil photo pour capturer celles qu’elles côtoient chaque jour, les sœurs comme les élèves. Mais son talent est là, blotti dans l’ombre, détecté par Claude Lelouch qui lui donne sa chance et l’engage comme photographe de plateau à 18 ans. « J’étais totalement fascinée par ce mec qui filme en courant caméra à l’épaule. » Depuis, à chaque nouvelle photo, elle se fait son film intérieur avant de diriger son objectif vers son modèle, pour capter la force d’un regard, l’intimité de l’être et la force des non-dits. Jusqu’à la découverte d’un sarcome du genou et l’amputation de sa « guibole », un handicap dont elle ne parle jamais à personne.

La découverte des corps

Les sœurs les cachaient entre cornette et robe, dans sa famille le corps était inexistant, on ne se touchait pas, on ne s’écoutait pas, et puis il y a eu le déclic : le regard porté sur sa mère, toujours élégante, bien coiffée et parfumée, lui a donné la confirmation que regarder, c’est sublimer. Elle a pris à bras-le-corps sa vie à 100 à l’heure pour oublier la douleur et ne voir que la beauté, là où elle se devine. Emmanuelle Béart nue, telle une déesse sortie de l’eau à l’Ile Maurice au soleil levant, Naomi Campbell difficile et inapprochable marchant vite dans Marrakech ou Marie-Agnès Gillot, danseuse étoile, un corps hors normes, une force d’homme dans un corps de femme.

« Quand je photographie, je n’ai plus peur de rien. Derrière mon œilleton, je me sens plus forte que tout, j’oublie tout, je me sens capable de tout. »

Des rencontres marquantes

Johnny Hallyday, Guillaume Depardieu (handicapé comme elle), Fabrice Luchini ou Vincent Cassel, les hommes font aussi partie de son palmarès. Pendant ses séances photo, Sylvie s’évade dans un autre monde, une autre dimension, mais sans oublier son handicap et surtout la colère qui l’accompagne. Avec pour venir en aide aux autres, un livre qui raconte son histoire. À Laetitia Casta, elle a avoué qu’il lui manquait une jambe, après une remarque « Mais qu’est-ce que tu as à ta jambe ? ». Et la star de lui répondre « J’aimerais être belle de l’intérieur un jour comme toi ».

Vicky Sommet

de Sylvie Lancrenon (Albin Michel, mai 2021)

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