Nathalie Krone, la paludière du golfe

0

Dans le golfe du Morbihan, du côté de l’île de Tascon, au coeur d’un Espace Naturel Sensible¹ préservé, une paludière qui ne l’a pas toujours été, nous révèle avec passion les secrets de son métier… qui ne manque pas de sel.

Coup de foudre pour le sel

Elle n’a pas toujours rêvé de fleur de sel, mais obstinément de nature et de produits du sol. Après avoir renoncé à l’élevage en raison du triste sort des animaux conduits inévitablement à l’abattoir, elle s’est tournée vers le maraîchage. Avec l’objectif de faire du bio en quantités raisonnables, Nathalie a suivi une formation pendant un an et s’est mise en quête de terres adaptées. Mais malgré une prospection méticuleuse et tenace, trouver des sols disponibles s’est avéré mission impossible. C’est alors qu’une opportunité s’est présentée. En effet, son mari, paludier depuis toujours à Guérande, lui fait une proposition : exploiter une saline. Avec compétence et expertise, il lui apprend le métier auquel Nathalie prend goût et elle commence à l’aimer au point d’oublier le maraîchage. En 2016, le Morbihan cherche un repreneur pour la saline de Saint-Armel située dans le fond du golfe. Le couple effectue une visite approfondie des lieux et partage un véritable coup de foudre pour cet Espace Naturel Sensible.

C’est en 2017 que Nathalie vole de ses propres ailes avec son matériel de récolte et simultanément met en place les visites pédagogiques souhaitées par le département.

La vie d’une paludière

Nathalie gère seule l’entretien, la récolte, la production, le stockage, le tri et le conditionnement des mélanges qu’elle crée de façon à valoriser ce produit naturel pour le rendre plus lucratif. L’année s’écoule en plusieurs phases : l’entretien de la saline, son habillage, c’est-à-dire le nettoyage des bassins et le retrait de la vase destinée à protéger le pont en argile. Au cours de la période creuse, on effectue aussi les réparations des dégâts causés par les tempêtes. En fonction du soleil et de l’absence de pluie, la récompense se dessine et la récolte démarre, celle du gros sel le matin et de la fleur de sel l’après-midi, qui peut représenter 10% les bonnes années. Les outils du paludier n’ont pas changé et les techniques traditionnelles ancestrales de récolte sont perpétuées. Le las, utilisé pour le gros sel est composé d’un manche en carbone de 5 mètres de long et d’une maille en bois qui décolle le sel sur le fond argileux responsable de la couleur grise. La lousse ressemble à une écumoire attachée à un long manche et permet de récolter la fleur de sel depuis le rebord des bassins.

Si le paludier officie au nord de la Loire, on parle de saunier au sud de ce fleuve, la différence entre les deux termes est simplement géographique.

À la fois solitaire et communicante

Pour compenser les mois d’isolement, les visites commentées débutent à Pâques avec l’arrivée des familles ; les scolaires ainsi que les classes de mer investissent les lieux régulièrement car les instituteurs en apprécient l’originalité, ainsi que le message pédagogique de Nathalie. Dans cet Espace Naturel Sensible qui bénéficie d’une hyper protection, on trouve une partie salicole, une partie ostréicole et une zone de quiétude pour les oiseaux. Tout cet ensemble permet à Nathalie de transmettre son savoir-faire artisanal et d’enseigner le respect de la nature qu’elle chérit et défend farouchement.

Une femme passionnée exerçant un métier ancestral dans un espace naturel rare, de quoi passer un moment paisible et instructif hors des sentiers battus !

Brigitte Leprince

Marais salants de Lasné, route de l’Ile Tascon, 56450 Saint Armel

¹Les Espaces Naturels Sensibles (ENS) visent à préserver la qualité des sites, des paysages, des milieux et habitats naturels et les champs naturels d’expansion des crues. Créés par le département, ils permettent à celui-ci d’élaborer et de mettre en œuvre une politique de protection, de gestion et d’ouverture au public de ces espaces naturels. (CEREMA)

L'article vous a plu ? Partagez le :

Les commentaires sont fermés.