Martine chez Gallimard

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Cela ne nous rajeunit pas, Gallimard souffle les 70 bougies de Martine, avec pour cadeaux une exposition et la sortie du 64ème album, opportunément baptisé Martine à Paris. Née sous les crayons et pinceaux de Marcel Marlier (1930-2011) et dans la tête de Gilbert Delahaye (1932-1997) chez Casterman, cette petite fille aux joues roses, éternelle optimiste, fait rayonner depuis 1954 sa bonne humeur et sa soif de curiosité via le monde entier. Plus de 120 millions d’albums vivent ainsi entre étagères et coffres à jouets français et 40 millions voyagent en langues étrangères. À travers un dessin très réaliste et un souci du détail affirmé les Martine sont devenus des incontournables de la littérature jeunesse des années 50. Forcément datés, on ne doit pas relire aujourd’hui les premiers titres avec nos lunettes de presbyte : ayons un peu d’indulgence et remettons cette petite héroïne dans son contexte, celui du baby-boom des Trente glorieuses. De Martine à la ferme à Martine et le Prince mystérieux, les auteurs feront au gré de l’évolution sociétale bouger sensiblement les lignes, les traits et le propos. Un changement de coiffure ou de vestiaire, l’évocation de sujets plus contemporains (écologie – culture) apporteront quelques touches de modernité au personnage. Sentant un désir d’émancipation, d’indépendance et d’audace pointé en filigrane des pages glacées, bridé par un discours un peu convenu de ses deux papas, on a envie parfois de lui dire : « Lâche-toi Martine ! » Trop petite fille modèle vivant dans un monde un peu trop lisse, un tantinet bourgeois, certaines lui préfèreront Caroline, sa rivale imaginée par Pierre Probst (Albums roses, Hachette), garçon manqué, flanquée de sa ménagerie, délurée et fantasque au volant de sa voiture jaune ! Brunette contre blondinette ! Patapouf contre Pitou ! Babies vernies-jupette contre Tennis-Salopette ! Gallimard contre Hachette ! À chacune sa Madeleine.

Christine Fleurot

Martine, éternelle jeunesse d’une icône, Galerie Gallimard, 30 rue de l’Université, 75006 Paris. Exposition gratuite du mardi au samedi de 13h à 19h. Jusqu’au 7 mai 2024.

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