Eva Jospin : des doigts de fée

0

Quel lieu mieux adapté que le Musée de la Chasse et de la Nature pour accueillir les installations d’Eva Jospin ? Son monde végétal et minéral tout en trompe-l’œil dialogue en harmonie parfaite avec l’Hôtel de Mongelas à tous les étages.

Une ancienne locataire

Eva Jospin connait déjà les lieux puisqu’il y a dix ans elle y enracinait déjà une de ses forêts mystérieuses de carton sous les combles. Pour fêter cette décennie, le Musée de la Chasse et de la Nature lui a donné carte blanche afin qu’elle y expose ses œuvres récentes mais aussi une création inédite, la Galleria. C’est par ce passage obligé que le visiteur est invité à entrer dans le monde merveilleux et poétique de l’artiste. Une galerie au plafond à caissons et aux murs de vitrines qui n’est pas sans rappeler l’ambiance mystérieuse d’un cabinet de curiosité italien de la renaissance (studiolo).

Une alchimie mystérieuse

Au début l’œil est immanquablement intrigué par ce travail de patience, de minutie, de virtuosité et on se surprend à imaginer le cutter, le laser, le pliage, la colle, la superposition de couches de carton. Puis, la magie opère… De ce matériau pauvre, Eva Jospin, par une transmutation magique, dégage l’esprit de sa curiosité pour le happer vers un monde onirique, celui qui nous ramène aux contes de l’enfance avec ses paysages miniatures, ses grottes mystérieuses, ses cabanes habitées de lianes et ses villes utopiques. On se souvient alors des illustrations de Gustave Doré, Gulliver apparait et plus près de nous le graphisme plus contemporain de Druillet ou des Cités obscures de Schuiten. L’imagination galope en toute liberté.

« J’essaye de travailler sur le rapport à l’illusion, l’artifice est un plaisir. »

Maîtresse de l’illusion

Dans la biographie de la plasticienne, on apprend que l’ancienne pensionnaire de la Villa Médicis avait commencé des études d’architecture et se rêvait scénographe. Ici elle a l’opportunité de s’exprimer dans tous les registres. Infidèle cette fois-ci à son matériau de prédilection qu’est le carton brut, elle utilise aussi le fil de laiton et de cuivre, le plâtre, la cire, le papier coloré et le bois avec la même dextérité et la même maîtrise technique. Magnifiant les matériaux, tout n’est qu’illusion et artifice à travers capricci, rocailles, nymphées et cénotaphe, jardins baroques qui peuplent son imaginaire.

Rares sont les expositions où l’on se laisse basculer avec une telle facilité à la rêverie.

Christine Fleurot

Galleria, expo au Musée de la Chasse et de la Nature, Paris 3e, jusqu’au 20 mars.

L'article vous a plu ? Partagez le :

Les commentaires sont fermés.