Les livres d’été de nos bibliothécaires

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L’art, miroir de l’âme. Traquer la beauté où qu’elle soit est une quête, souvent le combat d’une vie. Laissez-vous guider vers l’image à l’aide de la sélection proposée par nos bibliothécaires.

©LivresLa solitude Caravage de Yannick Haenel (Edition des vies, Fayard, février 2019)

Incarner le sublime. Pari réussi par Yannick Haenel qui nous offre un portrait saisissant du Caravage. L’étude poussée des tableaux, étayée par une connaissance approfondie des Écritures, nous conduit au plus près de la vérité du peintre de génie. La force des compositions, les fonds sombres, animés d’écarlate et d’ocre, le surgissement de la lumière, sont au service du seul message divin. Et pourtant le Caravage fut livré à des passions contraires qui font la substance même de son oeuvre. Sa vie tapageuse lui aura valu la prison, l’exil parfois… La protection des princes Sforza-Colonna va lui permettre bien souvent de se tirer d’affaire. Extraordinaire hommage à la peinture et à ce qu’elle nous transmet à travers les siècles !

Là où chantent les écrevisses de Delia Owens (Ed. Seuil, janvier 2020)

Dessiner le vivant. Kya est une sorte de Mowgli au féminin… avec la compagnie des oiseaux du marais ; ce marais riche de trésors, tels plumes et coquillages sera pour elle l’école de la vie. À sept ans elle se retrouve seule avec son alcoolique de père, dont les accès de violence ont fait fuir sa mère et sa fratrie. Kya, comme sa mère, sait dessiner et aquareller tout ce qu’elle voit. Des hommes de passages ont succombé au charme de la fille sauvage aux pieds nus. Il y aura une mauvaise rencontre qui fera d’elle une victime parfaite, tant les préjugés et l’ignorance sont répandus dans la bourgade voisine. La rencontre avec Tate, garçon cultivé, passionné par la nature et qui va lui apprendre à lire, sera providentielle. Et aussi la bienveillance du couple noir qui vit en marge des ragots du village. Sa profonde connaissance des richesses naturelles de ce lieu la fera connaître à un éditeur, et elle devient un écrivain reconnu. Un premier roman stupéfiant !

Belle Greene d’Alexandra Lapierre (Ed. Flammarion, janvier 2021)

L’art pour tous. New York, années 50. L’incroyable parcours de Belle Greene, d’origine métisse qui parvint à être directrice de la prestigieuse Morgan Library. Il lui a fallu pour cela dissimuler ses origines, rompre avec un père activiste et célèbre. Par son intelligence, sa compétence, sa combativité, elle va prouver de quoi elle est capable. Elle va intégrer le monde des milliardaires, des collectionneurs, devenir la femme de confiance du banquier milliardaire J.P. Morgan. Son objectif était de faire d’une institution réservée à l’élite, un lieu ouvert au public. Alexandra Lapierre nous livre un roman absolument passionnant, fruit de trois ans de recherches approfondies, et le portrait inoubliable d’ une femme qui va payer au prix fort la liberté de choisir son destin.

Béatrice Bothier

©Livres Le Musée, une histoire mondiale, Tome 1  : « Du trésor au musée », Tome 2 : « L’ancrage européen, 1789-1850 de Krysztof Pomian (Éditions Gallimard, octobre 2020 et mars 2021).

Entreprise ambitieuse, mais ô combien instructive. Dans ces deux tomes (le troisième est à venir), Krysztoff Pomian nous explique pourquoi le musée est devenu un phénomène mondial. Concentré de savoir politique, religieux, culturel et scientifique, le musée est devenu progressivement un phénomène universel. Pour l’expliquer, l’auteur nous entraîne (tome 1) sur les différentes étapes d’un circuit qui va de la Chine des Han à la France de Charles V et de François Ier en passant par l’Italie, berceau véritable de cette institution. Avec la Révolution française (tome 2), l’accès aux chefs-d’œuvre est élevé au rang de droit de l’Homme et le musée est chargé d’en favoriser l’exercice. L’auteur a accompli une œuvre remarquable. Le texte est d’une grande érudition, l’iconographie d’exception. Une invitation donnée à chacun de découvrir ou redécouvrir les musées, voire de préparer ses visites en attendant de pouvoir y retourner.

Le parfum des fleurs la nuit de Leïla Slimani (Editions Stock, janvier 2021)

Le temps d’une nuit, Leïla Slimani raconte sa déambulation dans le musée vénitien qu’est La Douane de Mer. Un moment hors du temps, favorable au questionnement. Quelles émotions peuvent bien provoquer une nuit passée en solitaire dans un musée ? Inspirée par les œuvres exposées, l’écrivaine se confie. Souvenirs d’enfance, réflexion sur l’art, sur le  processus d’écriture… Leïla Slimani, d’une écriture fluide, nous fait découvrir son univers, nous parle d’écriture, de son rapport à l’art contemporain. Une confession nocturne, d’une forte intensité qui donne un texte pudique, d’une grande sensibilité sur les écrivains et la création littéraire.

Florence Desgranges

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